-Poèmes Divers-

Du plus récent au plus ancien

 

Nuit Blanche

Ding, dang dong, c’est elle qui sonne
Raisonne de sa voix joyeuse
Par delà les rues ennuyeuses
Au fond de la nuit qui frissonne

Ding, dang, dong, c’est trois pas de danse
Qu’empruntent les fées de l’hiver
Pour tourbillonner dans les airs
Et tombent mourir en silence

Ding, dang, dong, bercés d’heureux rires
Qui roulent sans rien demander
Sans épargner les délaissés
Et les écrasent sans frémir

Superbe fête ! Ding, dang, dong
Cloche de glace au son cristal
Neige valsant dans ses pétales
Et rend la nuit toujours plus longue

Car il est là, l’enfant perdu
Assis à l’entrée de l’église
Ding, dang, dong, mais quelle surprise !
Emerveillé et les pieds nus

Il regarde le ciel rieur
Ecoute les chants religieux
Danse lui aussi de son mieux
Et rêve d’une vie meilleure

Ding, dang, dong, bientôt va se taire
Les rires, la fête et les chants
Et peut-être bien cet enfant
Dans le linceul blanc de l’hiver

Tout se recouvre, chut ! Voyez !
Les Ding, dang, dong sont arrêtés…

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Cinquante ans

Petite fille sur les pavés
Saute les ravins imaginaires
Dessinés sous le préau désert
Et ramasse une feuille tombée

Feuille tombée de vertes pensées
Ce sont les beaux jours de la jeunesse
Amis toujours et vaines promesses
Cantine bruyante et plats salés

Salés comme les larmes du temps
Qui file sans demander son reste
Délaissant ses marques manifestes
Sur la pierre des grands bâtiments.

La petite fille a bien grandi
Cinquante années se sont écoulées
Et bien des choses se sont passées
Dans la grande école de la vie

Vie mouvementée, feuille rangée
Séchée, brunie mais encore là
N'oubliera pas le temps d'autrefois
Premiers amours et mignons pechés.


Feuille tombée, tombe effeuillée
Mais ne jamais donc effacer
Les âmes qui nous ont aidées.

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Le Vampire

Ce soir est venu dans ma chambre
L’ombre vaporeuse des nuits
Qui se languit tant sur mon lit
Pour m’emprisonner dans son ambre

Je m’étonnai et lui dis :
« Qui est ce sombre visiteur
Aux lèvres-sang qui brisent l’heure
A la peau blanche et yeux minuit ? »

Le Léthé ne répondit pas
Mais baissa la tête et sourit
D’un air cynique de folie,
Et tendrement il m’effleura.

D’un mouvement brusque il me prit
Le bras et vers lui me tira
Sa bouche la mienne agrippa
Et m’entraîna lors dans l’oubli.

« Où m’emmènes-tu beau maudit,
Dans la couche du blanc tombeau
Où mon corps ira en lambeau
Tout prêt de ton être assouvi ? »

Rapidement il me fit taire
Me croqua le cou et frémit
N’entendit pas que je gémis
Sous sa douce poigne de fer

« Je viendrais te voir chaque nuit,
Me dit-il enfin à l’oreille,
Boire ton sang chaud et vermeil.»
Et à regret je m’assoupis.


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Loup, Loup, où es-tu?

Loup, loup, où es-tu?
Loup, loup que fais-tu?

Je mange le coeur d'un enfant
Qui ne rira plus maintenant
De mes longues oreilles noires

Loup, loup, où es-tu?
Loup, loup que fais-tu?

Je pleure des larmes sanglantes
Et déchire l'âme mourante
Que j'ai trouvé dans le dortoir

Loup, loup, où es-tu?
Loup, loup que fais-tu?

Je me tapis dans l'ombre pour
Vous lacerer de mon amour
De l'aube rose jusqu'au soir

Loup, loup, d'où viens-tu?
Loup, loup, que veux-tu?

Je suis un enfant de la nuit
Né de la goutte de l'oubli
Propre reflet de ton miroir

Loup, loup, d'où viens-tu?
Loup, loup, que veux-tu?

Me repaître de l'innocence
Et de l'essence de l'enfance
Que je guette dans les hitoires

Loup, loup, d'où viens-tu?
Loup, loup, que veux-tu?

Je veux ton corps pur et brisé
Désarticuler ta pensée
Faire couler l'onde et la boire

Loup, loup, qui es-tu?

Quoi? Tu ne me connais donc pas?
Moi qui viens te chercher parfois
Jusque sous ton court lit de bois
Alors quoi? Qu'est-ce que tu crois?
Le petit chaperon, pour toi
Il est si rouge mais pourquoi?

Loup, loup, que dis-tu?

C'est le rouge du sang qui tombe
Quand je dévore les colombes
Et tu peux alors savoir que
Je n'aime pas trop les curieux
_Sauf au souper_

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Eloge à la vieillesse

Regardez ces carcasses vides
Qui tendent leurs lèvres outrageuses
Leur cœur est devenu aride
Autant leur humeur ombrageuse

Leurs yeux fardés de bleu et rose
Restent grand ouvert bêtement
Admirent d'une envie morose
Cette jeunesse goulûment

Personne ne le devinerait
Que ces laides sont de très vieilles
Quarante ans déjà qu'elles traquaient
Les rides sur leur peau d'abeille

Sottes comme un zoo extatique
S'empressent aux dernières pommades
Et leur chevelure électrique
Fane leur dernière parade

Leur visage trop étendu
Fait de mille et une coutures
Permet un sourire entendu
" Regardes comme je suis pure ! "

Non, tu es très moche Madame
Ce n'est pas cela la beauté
Toi qui te rengorges et te pâmes
Je crois que tu as tout raté

Vois cette grand-mère élégante
Aux éclatants cheveux de neige
Sans rouge à la bouche poignante
Sinon peut être un peu de beige

Sa pose altière inspire tant
Sagesse et grandes connaissances
Sa main fine tient fermement
Le camée blanc de sa naissance

Elle doit se pencher pour lire
Le souvenir de ses années
Le mélancolique sourire
Du visage qu'elle a aimé

Moi aussi j'aimerais être comme ces femmes
Qui devant le temps et la mort gardent leur âme
Merveilleuse et douce comme une belle enfant
Aux parfums chatoyants des contes d'antan

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La Chute de Lucifel

L'ange le plus brillant, merveilleuse bonté
A trop voulu aimer la sotte humanité

Ô Seigneur, prends pitié de ma longue misère !

Prométhée à la flamme brûlante et divine
Le maudit infidèle, fuis les cieux en colère !
Uses donc la douleur et ta peur assassine
Mais jamais n'oublies ta noblesse naguère
Et gardes tes servants aux tendances mutines

Ô Seigneur, prends pitié de ma longue misère !

Non, la lumière s'efface au dessus de sa tête
Outre-tombe qui l'emporte dans les ténèbres
Il ne peut qu'entendre les échos qui s'arrêtent
Roulement de ses plaintes sur l'orbe funèbre
Et se déchire alors dans les Enfers prophètes

Enfante les sages mémoires
Sanglote tant ses ailes noires
Taquine les divins espoirs

Terrifiant et superbe Maître de douceur
Oublies vite ce Père injuste et difficile
Malheureuses prières, gardez vos ardeurs
Bibliques séraphins pleurent l'âme fragile
Et savent leur ancienne étoile dans l'horreur
Et crient, souffrent, pleurent son éternel exil

Ô Seigneur, prends pitié de ma longue misère !

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Pour Phénix

Le ciel azuré de l'été
Cache en son sein un trésor
Comme de l'or
Lumière couvre sa beauté
Mais vint alors quand la nuit tombe
Sort et surplombe
L'oiseau superbe et apprêté
De flammes et de braises vermeilles
Nées du soleil

Il brûle de vivre ses rêves
Et comme lui tu as des ailes
Ma demoiselle
Ta plume glisse sans trêve
Tombe et renaît de ses tessons
Sans abandon
Crayonné dansant qui s'élèvent
Couleurs éprises et amusées
Telles des fées

Tu es ce mystique animal
Tu trembles, suffoques et chavires
Et puis soupires
Devant cette feuille fatale
Qui ne laisse pas de répit
Méchante amie!
A l'artiste sentimental
Qu'elle veut à jamais hanter
Le dévorer

Défends-toi donc de sa blancheur
Saignes-la, ange flamboyant
Très lentement
Déchires, séraphique douceur!
Ses flancs offerts à tes désirs
Ou tes délires
Maîtrise tes cendres à cette heure
Et pour toujours tu règneras
Sur tout les rois

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Vision d'une marionnette

Ombre dansante et rieuse
Je m'amuse d'ordinaire
De vous donner, pour vous plaire
Mes amours ennuyeuses

Vous m'habillez de vos fils
Lumières folles et nocturnes
Embrassés d'espoir taciturne
Couvrent de songes dociles

Ô mon Maître, quel délice !

De m'enivrer de vos yeux
Alcool émerveille et doux
Qui mord et tue comme il veut…
Comme je me mords de vous !

Ô mon Maître, quel délire !

De goûter vos tendres lèvres
Poison divin sage et fou
Qui se meurt, brûlante fièvre…
Comme je me meurs de vous !

Je veux vous garder rien qu'à moi !

Chuchotez moi encore ces mots-là
Ceux que vous m'avez pleuré autrefois
Maître, comme je vous hais aimez moi
Car sur moi, Vie ou Mort vous avez droit

Habiles mains, liez notre amour passé
Car, je me dois de vous le confesser
Comme je ne veux être séparée
De vos paroles qui font rêver

Et tant notre âme intimement nouée
Tirent leurs ficelles noires et dorées
Notre destin implacablement né
De deux êtres tellement opposés

Car sans moi vous n'êtes rien, car sans moi
Vous ne serez jamais plus ce grand roi
Qui règne par delà et au-delà
Car nous n'existerions plus vous et moi

Qu'il est bon d'être une ombre gracile qui danse à vos pieds
Ô mon Maître que j'ai tant aimé.

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La chute de Bysancia
(Pour un projet BD avec Phénix)

Bysancia ! Bysancia !
Toi perle de nacre adorée
Toi qui de trésors est sculptée
Bysancia ! Bysancia !
Où l'onde du bonheur pénètre
Où le cœur triste peut renaître

Mais déjà les ténèbres rôdent
Des larmes de sang éperdues
De viles mains noires filent et brodent
La demeure des disparus

La terre hurle et gronde
La pluie tombe et saccage
Guide la Mort féconde
Feu, eau, glace et orage
Servants de la misère
Des hommes massacrés
Pleure ! Pleure Mère !

Bysancia la Belle est tombée.

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Le Chant des Morts
(Dans Le Seingeur-Prisonnier)

Quand le vent hurle par delà les murs
Quand le soleil même ne peut plus rien
Même plus réchauffer notre destin
Nous nous plions à ses règles impures

Brûlures intestines et langoureuses
Sourdes de nos cris et de nos prières
Elles jouent et dansent les bienheureuses !
En nous lançant des charmes mortifères.

La Vie de sa faux aime nous hanter
Sa robe blanche diaphane volant
A travers la rouge pluie de sang
Qu'elle se plait avec joie de semer

L'on crie : Nous sommes morts ! Nous sommes morts !
Et elle ricane d'un air sarcastique
Nous murmure d'une voix laconique :
" Tu vies ! C'est juste ton âme qui dort ! "

Pourquoi notre cœur est-il condamné
A rester enfermé dans ces cages
Comme le plus grand des sages
Dans notre abri verrouillé ?

Le vent hurle
Le soleil brûle
Solitaire, je me meurs
D'une vie de douleur.

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L'Enchanteresse

D'un hurlement frissonnant
Tu m'attiras à tes côtés
Et je te vis, voleuses d'enfants
Au sommet d'un rocher

Brillent tes yeux au clair de lune
Tels des joyaux ardents
Du plus pur des bleus, magiques runes
Tâchées par le pourpre du sang

Griffes de bête, triste esprit
Arrachant la chair sanglante
Des arcanes de ma folie
Et de ma peur languissante

Louve mortelle, merveilleuse créature
Ange ailé mais démon pourtant
Lave ses meurtrissures
Dans l'eau des déesses d'antan

Je m'approche, le miroir se brise
Fourrure devient peau humaine
Et je me regarde surprise
Chasser sur les grandes plaines